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D’une vi(ll)e à l’autre

J’ai souvent déménagé. Conclusion : un déménagement est surtout un voyage intérieur. S’il peut avoir sa source dans des obligations externes, professionnelles, pour suivre telle formation, exercer tel métier, ses ressorts et ses enjeux semblent avant tout psychologiques. L’acceptation-même du déménagement, lorsqu’il est une sorte d’obligation, confronte à soi-même, à ce qu’on est prêt à sacrifier, à ce qu’on souhaite privilégier.

Encore, le parcours parfois laborieux de l’obtention d’un nouveau logement teste une certaine forme de patience. Quelle question sommes-nous prêts à tolérer de la part d’un bailleur, quelle procédure allons-nous accepter au nom d’une tension sur les biens à louer ? Le logement, c’est la première unité, l’environnement où tout est possible, a contrario son absence ou son inadéquation sont des poids inaltérables à la construction d’une vie. Combien se comprend alors dans certains endroits le déséquilibre malsain locataire – bailleur.

Chercher un logement peut être aussi brutal que chercher un emploi, car on scrute votre vie sous tous ses aspects, même sans le dire. Votre métier, ce que vous gagnez mais aussi votre vie privée. Sans faire de généralisation, se présenter seule à une visite comme mère avec enfant pénalise d’emblée face à un couple qui ferait de concert la visite des lieux. Critères officieux ou biais cognitifs, difficile d’affirmer qu’il y a discrimination organisée mais la confiance augmente quand le schéma relationnel traditionnel attendu à un certain âge est réalisé.

Le déménagement est un voyage intérieur, paradoxalement plus ou moins prononcé selon sa relation aux choses. C’est l’occasion du tri ou son impossibilité. C’est la remémoration des temps par l’objet et la tentation d’ailleurs de tout donner devant ce désir de tout garder. A chaque déménagement, se départir et vivre plus léger. Vivre modulable et transportable. L’objectif n’est pas encore atteint mais c’est en bonne voie. Ne garder que l’utile et l’agréable (critères cumulatifs). Donner ce qui encombre l’espace et l’esprit. Acheter de moins en moins, faire avec ce qu’on a et savoir que l’on a toujours trop puisqu’on arrive (très) bien à vivre en mode camping dans le chaos d’avant et d’après déménagement.

D’une ville à l’autre, d’une vie à l’autre, chercher l’essentiel.